Selon la CSC, la Workers’ Compensation Board (« Commission ») est habilitée à prendre des règlements en vertu du Occupational Health and Safety Regulation pour assurer la sécurité au travail

Selon la CSC, la Workers’ Compensation Board (« Commission ») est habilitée à prendre des règlements en vertu du Occupational Health and Safety Regulation pour assurer la sécurité au travail

Dans la décision West Fraser Mills Ltd. c Colombie-Britannique, la Cour suprême était appelée à déterminer si le Occupational Health and Safety Regulation était un exercice raisonnable de l’autorité déléguée à la Commission. 

 

Survol des faits 

Un abatteur d’arbres a été frappé mortellement par un arbre en décomposition alors qu’il travaillait dans un secteur à l’égard duquel West Fraser Mills Ltd. détenait un permis d’exploitation forestière. L’abatteur travaillait pour un entrepreneur indépendant. 

La Workers’ Compensation Board (« Commission ») de la Colombie-Britannique a mené une enquête au sujet de l’accident et a conclu que West Fraser Mills Ltd. avait omis de se conformer au Règlement en lien avec la planification et l’exécution des opérations forestières, et la pratique sécuritaire dans le domaine du travail, approuvée par la Commission, conformément à l’article 26.2 du Occupational Health and Safety Regulation. La Commission a infligé une pénalité administrative à West Fraser Mills Ltd. pour la violation, conformément au paragraphe 196(1), du Workers Compensation Act Loi »). 

West Fraser Mills Ltd. a demandé le contrôle judiciaire de l’ordonnance. Un agent de révision a confirmé la pénalité administrative infligée par la Commission et sa conclusion de violation. De plus, la Cour d’appel de la Colombie-Britannique a confirmé l’ordonnance du Workers Compensation Board. West Fraser Mills Ltd. est donc comparu devant la Cour suprême du Canada. 

 

Analyse juridique 

Dans ce pourvoi, la Cour suprême devait se prononcer sur deux enjeux juridiques. D’une part, la Cour devait déterminer si le paragraphe 26.2(1) du Règlement était ultra vires. D’une autre part, si la sanction administrative prévue au paragraphe 196(1) du Workers Compensation Act pouvait seulement être infligée à un employeur, et non pas à un propriétaire. Sous la direction de la juge en chef McLachlin, la majorité de la Cour suprême rejette le pourvoi et confirme l’ordonnance du Workers’ Compensation Board. 

 

  1. Validité du paragraphe 26.2(1) du Règlement

Conformément à l’arrêt Dunsmuir, la norme de contrôle applicable est celle de la décision raisonnable. En l’espèce, la Cour applique une norme de caractère raisonnable souple puisque la loi habilitante accorde à l’organisme subordonné un grand pouvoir discrétionnaire dans l’adoption des règlements appropriés. 

La Cour devait décider si le paragraphe 26.2(1) du Règlement résulte d’un exercice raisonnable du pouvoir de réglementation délégué à la Commission. Essentiellement, la question était de déterminer si le paragraphe 26.2(1) du Règlement relève du pouvoir délégué par l’article 225 du Workers Compensation Act. 

Premièrement, lorsqu’il est interprété selon les principes d’interprétation habituels, l’article 225 autorise clairement le paragraphe 26.2(1). Comme la Cour suprême l’a souligné par, la Commission est censée concevoir les règlements qu’elle juge souhaitables pour favoriser la santé et la sécurité au travail. Or, le paragraphe 26.2(1) se rapporte clairement à la sécurité au travail. 

Deuxièmement, le Règlement s’intègre bien avec les autres dispositions de la Loi. À titre d’exemple, l’article 107 du Workers’ Compensation Act énonce de manière générale l’objet de la Partie III, soit de favoriser la santé et la sécurité au travail. Cela étant dit, l’article 107 a le même objet que le paragraphe 26.2(1) du Règlement. 

Troisièmement, la Cour suprême a soulevé deux autres éléments contextuels externes qui doivent être pris en compte dans le cas en l’espèce. D’abord, la Commission a adopté le règlement en question par suite de l’inquiétude exprimée par le gouvernement provincial à l’égard de l’augmentation du nombre de décès au travail dans le secteur forestier. Ensuite, le paragraphe 26.2(1) est considéré comme étant un prolongement naturel de l’obligation découlant de l’alinéa 119(a) de la Loi. 

En considérant les facteurs ci-haut, la majorité a conclu que l’adoption du paragraphe 26.2(1) était un résultat d’un exercice raisonnable du pouvoir délégué à la Commission conformément à l’article 225 de la Loi. Cet article de la Loi confère à la Commission le pouvoir de prendre les règlements souhaitables et nécessaires. 

 

Sanction suivant le paragraphe 196(1) de la Loi

Selon les juges majoritaires, la décision d’infliger une sanction à West Fraser Mills Ltd. en tant qu’« employeur » au sens de la Loi n’était pas déraisonnable. À cet effet, les arguments de West Fraser Mills ont tous été rejetés puisqu’ils soutenaient une interprétation étroite du paragraphe 196(1). La Cour suprême a préféré l’interprétation large du paragraphe 196(1) retenue par la Workers’ Compensation Appeal Tribunal. En effet, une seconde interprétation plausible du paragraphe 196(1) appuie davantage l’objectif de sécurité et l’application générale du régime. 

Or, même si elle était propriétaire suivant son permis d’exploitation, West Fraser Mills Ltd. était également employeur relativement au lieu de travail et au décès survenu. En ce sens, la Cour suprême a confirmé que West Fraser Mills Ltd. était un « employeur » pour l’application du paragraphe 196(1) puisqu’il existe un lien factuel entre ses activités et ses choix en tant qu’employeur, notamment les personnes censées surveiller le lieu de travail et l’accident survenu. 

 

Conclusion 

La Cour suprême a rejeté le pourvoi de West Fraser Mills Ltd. et a confirmé la décision du Workers’ Compensation Appeal Board. 

Cette affaire impliquait deux interprétations plausibles au regard du paragraphe 196(1). Une approche était plus restrictive, ce qui aurait miné les buts du cadre législatif. L’autre approche était plus large et reconnaissait l’importance de faire évoluer l’objet et les buts de la Loi. Enfin, la Cour suprême a rappelé que la décision prise par le Workers’ Compensation Appeal Board ne pouvait pas être considérée comme étant manifestement déraisonnable.

 

À NOTER : Cet article de blogue était originalement publié sur le site de Juriblogue.ca.  

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