Dois-je servir mon client dans la langue officielle de son choix ?
7 février 2019
Cette ressource traite de l’obligation des avocats prévue dans le Code de déontologie de toutes les provinces canadiennes à l’exception de l’île du Prince Édouard et du Québec de servir les clients dans la langue officielle de leur choix. Cette ressource traite aussi de l’obligation qu’ont les avocats en matière de connaissance des droits linguistiques autochtones. Par exemple, cette ressource aborde l’obligation qu’impose le Barreau du Nunavut à ses avocats de connaitre les droits linguistiques des Inuits.
Entre 2015 et 2016, tous les barreaux des provinces et territoires canadiens, à l’exception du Québec et de l’Île-du-Prince-Édouard, ont adopté une disposition dans leur code de déontologie respectif concernant l’obligation qui incombe à l’avocat de servir tout client dans la langue officielle de son choix. Cet article permet de faire le point et dresse un aperçu de cette obligation qui touche les droits linguistiques fondamentaux des individus face à l’administration de la justice.
En janvier 2010, la Fédération des ordres professionnels de juristes du Canada (« FOPJC ») a approuvé un Code type de déontologie professionnel (« CTDP ») pour les juristes. L’objectif était de créer un cadre national fondé sur des normes minimales de déontologie professionnelle. Ce code pouvait ensuite être adapté aux besoins spécifiques à chaque région. Les barreaux de l’Alberta, de la Colombie-Britannique, du Manitoba, de la Nouvelle-Écosse, du Nunavut, de la Saskatchewan, de Terre-Neuve-et-Labrador, des Territoires de Nord-Ouest et du Yukon ont tous intégré les principes découlant des dispositions sur les obligations de l’avocat en matière de droits linguistiques inscrites dans la section sur la qualité du service du CTDP.
Essentiellement, le modèle de la FOPJC prévoit le droit du client d’être informé de ses droits linguistiques dès que possible. L’avocat doit donc connaître les dispositions législatives et constitutionnelles applicables en matière de droits linguistiques, notamment celles prévues dans la Charte canadienne des droits et libertés ainsi que celles du Code criminel, et en informer son client. Cette obligation inclut la connaissance des droits linguistiques concernant les langues autochtones. À titre d’exemple, le code de déontologie du Barreau du Nunavut mentionne expressément la connaissance des droits linguistiques concernant les langues inuites.
De même, les commentaires sur les droits linguistiques dans la majorité des codes de déontologie au Canada spécifient que le choix de la langue officielle revient au client et non à l’avocat. Ce faisant, l’avocat ne peut prendre en charge un mandat s’il n’a pas les compétences linguistiques nécessaires.
Les avocats, qui travaillent dans les provinces et territoires mettant en oeuvre un code de déontologie basé sur le CTDP approuvé par la FOPJC, doivent aussi évaluer leur compétence à offrir des services dans la langue officielle choisie par leur client selon certains paramètres. En effet, les commentaires suivant la disposition sur les droits linguistiques réfèrent aux règles sur la compétence d’un avocat. Si, par exemple, un avocat reconnaît qu’il n’est pas suffisamment compétent pour servir un client dans la langue de son choix, l’avocat doit :
- refuser d’agir;
- obtenir les directives du client pour engager, consulter ou collaborer avec un [avocat] ayant les compétences pour effectuer cette tâche; ou
- obtenir le consentement du client afin d’acquérir les compétences sans délai, sans risque ou sans frais pour le client.
Ainsi, l’avocat ne peut agir seul s’il n’a pas les compétences linguistiques nécessaires. À cet égard, l’Ontario a ajouté une exception à son code de déontologie. Si l’avocat n’a pas les compétences linguistiques pour fournir les services requis dans la langue choisie par le client, il peut tout de même accepter le mandat s’il a les compétences pour fournir ces services et qu’il a le consentement du client par écrit. Ainsi, en Ontario, il est possible de contourner les exigences générales en matière de droits linguistiques avec le consentement du client. D’autre part, l’Alberta et le Nunavut prévoient eux aussi, dans leur code respectif, une exception à cette règle générale. On y prévoit la possibilité de servir un client dans la langue officielle choisie par ce dernier malgré l’absence de compétence linguistique dans cette langue s’il a recours aux services d’un interprète.
À l’Île-du-Prince-Édouard, aucune disposition n’est prévue dans le code de déontologie en lien avec les obligations linguistiques de l’avocat envers son client. La situation est semblable au Québec. En effet, le Code de déontologie du Barreau ne prévoit pas de disposition précise en matière de droits linguistiques. Toutefois, les avocats québécois ont l’obligation de communiquer avec leur client de façon à être compris par ce dernier. De plus, la Charte de la langue française prévoit, quant à elle, que les consommateurs de biens ou de services ont le droit d’être informés et servis en français.
En récapitulatif, les obligations des avocats en matière de délivrance de services juridiques peuvent être synthétisées ainsi:
X = Il existe une disposition à cet effet