L’enfant dans le contexte de divorce : est-ce qu’il a un mot à dire?
4 juin 2025
Ce texte s’inscrit dans un projet académique où les étudiants et étudiantes ont eu l’opportunité
de soumettre leurs articles de blogue pour publication sur Jurisource.ca.
Les enfants sont souvent un aspect important dans les instances de divorce. Non seulement pour où ils se trouvent après, mais aussi le rôle qu’ils peuvent jouer au procès. L’Association du Barreau canadien donne plusieurs exemples de comment un enfant pourrait être affecté par des conflits de droit de la famille. Par exemple, quand « l’enfant fait l’objet d’une procédure judiciaire », quand « l’enfant souhaite obtenir réparation dans le système de justice familiale », ou quand « l’enfant peut disposer d’un conseiller juridique »[1]. Les cours sont expertes à considérer le meilleur intérêt des enfants et ont une obligation de les considérer quand elles prennent une décision. De plus, les enfants peuvent jouer un rôle dans un procès selon leur niveau de maturité. Cela étant dit, est-ce que c’est assez pour assurer qu’une voix importante est entendue? À mon avis, oui. Cet article de blogue examinera brièvement ce que les cours considèrent dans les décisions liées aux enfants et comment est-ce que l’enfant peut y participer. Le but est de démontrer que la rigueur employée par les cours dans leurs décisions et comment elles interagissent avec les enfants est important pour assurer que les enfants ne peuvent pas être abusés par le système judiciaire, les avocats, les parents, et les autres individus.
Qu’est-ce que les cours considèrent dans leurs décisions?
La Loi sur le Divorce donne la définition d’enfant comme un enfant « des deux époux ou ex-époux : a) pour lequel ils tiennent lieu de parents; b) dont l’un est le père ou la mère et pour lequel l’autre en tient lieu »[2]. De plus, au paragraphe 2(1) de la Loi de 2020 sur le droit de l’enfance de la Saskatchewan, « enfant » est défini comme « célibataire de moins de 18 ans »[3]. Cela nous donne une définition assez concrète d’un « enfant » en Saskatchewan — un célibataire de moins de 18 ans, dont les deux époux ou ex-époux en litige sont, ou remplacent, ses parents.
Quand la cour prend une décision liée à une ordonnance de parentage, la Loi de 2020 sur le droit de l’enfance indique que la cour doit seulement considérer l’intérêt supérieur de l’enfant[4]. Le but est de protéger la « sécurité et bien-être physiques, psychologiques, et affectifs de l’enfant » « dans la mesure du possible »[5]. Dit d’une autre manière, « le tribunal tient uniquement compte de l’intérêt de l’enfant à charge lorsqu’il rend une ordonnance parentale ou une ordonnance de contact »[6].
Les facteurs spécifiques que la cour considère sont trop nombreux pour énumérer ici, mais ils incluent des considérations comme les besoins de l’enfant en tenant compte de l’âge et le stade de développement, « l’historique des soins qui lui sont apportés », l’éducation culturelle, linguistique, et religieuse, s’il y a de la violence familiale, la capacité de chacun des parents de prendre soin de l’enfant, et le point de vue et la préférence de l’enfant, prenant en contexte son l’âge et sa maturité[7].
C’est quoi le rôle de l’enfant?
Chaque enfant a le droit d’être entendu dans le procès qui l’affecte[8]. Mais, l’âge et la maturité d’un enfant sont très importants pour déterminer comment il peut contribuer à un procès. Le gouvernement du Canada dit que, quand les enfants deviennent plus âgés, leurs points de vue et leurs préférences sont généralement donnés plus d’importance[9]. Cela étant dit, tous les enfants se développent à leur propre cadence, alors ce n’est pas une science exacte[10]. Par exemple, un enfant de 11 ans était considéré comme capable et assez mature pour exprimer ses propres préférences à son conseiller juridique dans le dossier J.F. c C.L. en 2003[11]. Ceci était un dossier où l’enfant n’a pas voulu voir son père et a voulu vivre avec sa mère[12]. Même si la Cour d’appel du Québec n’a pas clarifié spécifiquement la maturité, elle a utilisé des termes comme « maturité requise pour exprimer ses vues » et la « capacité d’exprimer ses propres désirs et attentes »[13]. Il n’y avait aucun besoin que l’enfant doive exprimer un point de vue pour être entendu[14].
La façon dont un enfant s’implique dans les procédures dépend des circonstances. Si l’enfant est plus âgé et que les parents ont encore une relation amicale, il est possible que le point de vue de l’enfant soit pris en considération de manière informelle par les parents[15]. Autrement, dans des cas moins amicales ou plus formelles, un avocat peut faire des soumissions de la part de l’enfant ou un avocat peut être délégué à l’enfant pour le représenter[16]. Une autre façon est d’embaucher un psychologue pour faire un rapport à propos de l’enfant et la capacité de chaque parent d’éduquer l’enfant[17].
Est-ce que le rôle de l’enfant devrait être augmenté?
Le gouvernement du Canada note que c’est parfois une bonne idée de ne pas consulter l’enfant. Il dit que, dans les cas où l’enfant est très jeune ou quand il n’est pas capable de former ses propres opinions, peut-être c’est mieux si l’enfant est laissé hors du procès[18]. De plus, si quelqu’un, par exemple un parent, pose des questions et met de la pression sur l’enfant à propos de sa préférence, cela peut faire du mal à l’enfant en lui faisant croire qu’il a besoin de choisir un parent[19]. Tout cela pour dire, le système judiciaire ne devrait pas mettre de la pression sur les enfants, car ils sont des enfants. Pour la plupart, ils n’ont pas une bonne connaissance du système judiciaire et, pour les très jeunes, il y a le risque qu’ils pensent que le résultat sera leur faute.
Pour l’instant, je crois que les cours donnent assez d’importance aux enfants dans le contexte de divorce. Elles examinent de nombreux facteurs pour venir à une décision qui prend l’intérêt de l’enfant comme étant la seule priorité et laisse l’option pour l’enfant de contribuer s’il est assez mature. La maturité est même définie d’une manière générale, donnant l’occasion pour les jeunes d’aider s’ils sont capables. Si les cours mettent plus d’importance sur le témoignage des enfants, de n’importe quelle manière que cela se présente, le risque de faire du mal aux enfants dans un chapitre de leurs vies qui est probablement déjà très troublant va augmenter. À mon avis, les préjudices l’emporteront sur les avantages.
[1] L’Association du Barreau canadien, « 4.6 Droit de Famille » (2025) https://cba.org/fr-ca/resources/practice-tools/the-cba-child-rights-toolkit/family-law/.
[2] Loi sur le divorce, LRC 1985, c 3 (2e suppl), paragraphe 2(2).
[3] Loi de 2020 sur le droit de l’enfance, LS 2020, c 2, paragraphe 2(1) [Loi de 2020].
[4] Ibid, au paragraphe 10(1).
[5] Loi de 2020, supra note 3 au paragraphe 10(2).
[6] Loi sur le divorce, supra note 2 au paragraphe 16(1).
[7] Loi de 2020, supra note 3 à alinéa10(3)(a-k).
[8] B.J.G. c D.L.G., 2010 YKSC 44 au para 2. [B.J.G.]
[9] « Fiche d’Information – Le point de vue et les préférences de l’enfant » (18 Mars 2025) https://www.justice.gc.ca/fra/df-fl/fipvpe-fscvp.html.
[10] Ibid.
[11] J. F. c C. L., 2003 CanLII 11712 (QC CS). [J.F.]
[12] Ibid au para 65.
[13] Ibid.
[14] Ibid au para 66.
[15] « Fairway Divorce Solutions, Understanding Decision-Making Responsibilities and Parenting Arrangement in Canadian Law » (25 Mars 2024) en ligne (blogue): https://fairwaydivorce.com/resources/blog/understanding-decision-making-responsibilities-and-parenting-arrangements-in-canadian-law/.
[16] Ibid.
[17] Ibid.
[18] « Fiche d’Information », supra note 9.
[19] Ibid.