6 mythes sur les principes Gladue

6 mythes sur les principes Gladue

Les principes énoncés dans l’arrêt Gladue (1999 CanLII 679) par la Cour suprême visent à remédier à la surreprésentation des personnes autochtones dans le système carcéral. Ces principes, bien qu’établis depuis plus de deux décennies, demeurent entourés de plusieurs malentendus.

Vingt-cinq ans après l’arrêt Gladue, examinons les mythes présents dans le milieu juridique qui entravent la mise en œuvre des principes.

 

Mythe 1 : Les principes Gladue entrainent une réduction automatique des peines pour les personnes autochtones

Une des idées fausses est que les principes Gladue conduisent à une réduction automatique des peines pour les personnes autochtones. Or, comme le souligne l’arrêt Gladue :

« […] l’al. 718.2e) ne doit pas être interprété comme exigeant une réduction automatique de la peine, ou la remise d’une période justifiée d’incarcération, pour la simple raison que le délinquant est autochtone (para 88) ».

La Cour précise également que « [d]ans certaines circonstances, la durée de la peine infligée à un délinquant autochtone pourra être inférieure à celle de tout autre délinquant, alors que dans d’autres, elle pourra être identique (Gladue, para 79) ».

 

Mythe 2 : Les principes Gladue favorisent les personnes autochtones en raison de leur origine

Il est erroné d’affirmer que les principes Gladue constituent une forme de favoritisme envers les personnes autochtones. Cette fausse croyance ignore les réalités sociohistoriques uniques auxquelles font face les personnes autochtones.

Dans l’arrêt Gladue, la Cour suprême affirme que:

« [L’alinéa 718.2e)] a pour objet de remédier au grave problème de la surreprésentation des autochtones dans les prisons et d’encourager le juge à aborder la détermination de la peine selon une approche corrective. Le juge est tenu de donner une force réelle à l’objet réparateur de la disposition (para 93) ».

En d’autres mots, l’objectif est d’empêcher le système judiciaire:

  • d’infliger des peines inéquitables qui ignorent le contexte spécifique qui contribue aux infractions commises; et
  • de perpétuer les injustices, la discrimination et le racisme déjà subis par les personnes autochtones.

Les principes Gladue permettent d’offrir aux personnes autochtones un traitement juste et équitable devant les tribunaux.

 

Mythe 3 : L’application des principes Gladue est incompatible avec les autres principes de la détermination de la peine

Certaines personnes croient que l’application des principes Gladue est en contradiction avec les autres objectifs de la détermination de la peine, tels que la dissuasion ou la protection du public.

Dans l’arrêt Gladue, la Cour suprême est très claire :

« Comme pour toutes les décisions concernant la peine, la détermination de la peine à infliger aux délinquants autochtones doit se faire sur une base individuelle (ou au cas par cas): Pour cette infraction, commise par ce délinquant, ayant causé du tort à cette victime, dans cette communauté, quelle est la sanction appropriée au regard du Code criminel? (para 80) ».

De plus, dans R c Ipeelee (2012 CSC 13, para 75), la Cour suprême affirme que les principes Gladue s’intègrent harmonieusement dans le cadre plus large des objectifs de la peine puisqu’ils obligent les juges à tenir compte de tous les facteurs, autant ceux spécifiques aux personnes autochtones que les autres principes de la détermination de la peine.

 

Mythe 4 : Les principes Gladue s’appliquent seulement à la détermination de la peine

Une autre croyance erronée courante est que les principes Gladue ne s’appliquent qu’à la phase de la détermination de la peine. En réalité, la portée des principes Gladue dépasse le droit pénal. La jurisprudence a adopté une application très large des principes Gladue. En 2012, dans United States of America v Leonard (2012 ONCA 622), la Cour d’appel de l’Ontario indique que les décideurs doivent tenir compte des principes Gladue lorsqu’ils ont le pouvoir d’influencer le traitement donné aux personnes autochtones par les tribunaux (para 85). Voici quelques exemples de procédures au cours desquelles les principes Gladue peuvent être appliqués :

  • Audiences disciplinaires
  • Décisions de non-responsabilité criminelle
  • Audiences de mise en liberté
  • Enquêtes sur la remise en liberté
  • Outrage en matière civile
  • Extraditions
  • Décisions de la Cour martiale
  • Demandes d’habeas corpus d’une personne incarcérée

Pour en savoir plus, consulter le 8e chapitre du livre The Gladue Principles a Guide to the Jurisprudence de Benjamin A. Ralston (en anglais).

 

Mythe 5 : La mise en œuvre des principes Gladue se fait seulement par le biais des rapports Gladue

Bien que les rapports Gladue soient des outils importants, ils ne sont pas le seul moyen d’appliquer les principes. Autant les juges, les avocats que les avocates doivent considérer les principes Gladue (Ipeelee, para 60) avec ou sans rapport Gladue. Selon la Cour suprême, « Il est de la responsabilité des avocats de fournir ces renseignements personnels dans tous les cas, à moins que le délinquant ne renonce expressément à son droit à l’examen de cette information. » (Ipeelee, para 60)

De plus, il existe plusieurs autres programmes qui aident à l’application des principes Gladue, par exemple les lettres et les tribunaux de type Gladue. Il y a aussi des services d’accompagnement liés à ces principes, par exemple un service d’appui après la rédaction du rapport.

En revanche, la disponibilité de ces programmes varie énormément dépendamment des régions et même des villes. Compte tenu du financement variable, les programmes peuvent être créés et abolis d’une année à l’autre. Donc, une personne au Canada peut avoir accès à des programmes Gladue très développés alors qu’une autre n’aura accès à aucun programme.

 

Mythe 6 : Toutes les personnes autochtones sont satisfaites des rapports Gladue

Enfin, il est erroné de penser que toutes les personnes autochtones qui utilisent des rapports Gladue en sont satisfaites. Les rapports Gladue sont une solution non autochtone pour les personnes autochtones, même s’ils peuvent avoir un effet positif.

Plusieurs raisons peuvent rendre l’expérience négative, par exemple :

De plus, le processus peut être décourageant lorsqu’il traumatise la personne et, surtout, lorsqu’il n’apporte pas le résultat espéré.

Pour aller plus loin

Pensez-vous que les principes Gladue sont des concepts complexes? Ne vous laissez pas tromper! Souvent les défis sont associés à une mécompréhension des questions autochtones. Souhaitez-vous en apprendre plus? C’est simple! Voici des ressources faciles à comprendre:

Avez-vous une bonne compréhension des principes Gladue? Voici une ressource qui vous permettra de vous perfectionner et de découvrir l’évolution jurisprudentielle des principes: Reform the justice system is track 1 of the Justice Strategy.

 

Dans un autre ordre d’idées, une compréhension des cultures autochtones est importante pour fournir des services juridiques. Voici des ressources pour vous appuyer à mieux comprendre ces cultures :